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Star Wars Épisode VII Le Réveil de la Force

Un film de J.J. Abrams

 

 

 

 

 

 

 

          

 

 

 

 

 

 

 

 

La Renaissance du Phénix

 

 

            Au milieu de planètes et d'étoiles luminescentes dansant en apesanteur dans un ballet harmonieux, un vieil homme traverse les astres et raconte son histoire. « Des mythes ! Des légendes ! Â» se disaient les deux jeunes réfugiés avant d'écouter cet ancêtre : « La force, les jedi, tous ça c'est vrai ! ». La mémoire serait-elle alors devenue légende ? Le mythe se raviverait-il au point de redevenir histoire ? Cette dernière retrouverait-elle sa place dans la mémoire ? Tous ces événements héroïques, ces récits fondateurs sont-ils le fruit de notre imagination ? Star Wars VII est une renaissance, la renaissance d'un phénix, mais un phénix se souvient-il parfaitement de ses vies antérieures ?

 

            Nous, jeunes spectateurs, n'avons pas vraiment connu Star Wars. Nous n'en avons vu que des excroissances, voire même des dégénérescences. Nous n'avons jamais vécu, fait l'expérience, ni contemplé l'aura de la trilogie originale. Qui peut se vanter aujourd'hui d'avoir vécu la sortie du film original, non modifié, ni remastérisé ; d'avoir vécu la sortie d'un soit-disant nanard et observé sa transformation en culte mondial, évolution qui ferait pâlir toutes les religions.

 

            Nous n'avons observé que des protubérances, des ombres de cet événement unique. Star Wars pour nous c'est la VHS, le DVD, la télévision à la rigueur, et pour les plus jeunes le Blu-Ray et le téléchargement. Nous ne sommes que des aveugles, qui percevons par le biais d'une mémoire collective qui s'est bâtie au fil des décennies, désormais tellement ancrée culturellement qu'elle accède à sa propre vie. Nous sommes alors en droit de nous questionner : Star Wars n'est-il qu'un mythe qui se construit au fil des ans ? A peine quarante ans après sa sortie la saga devient une légende.

 

            Face à cette figure titanesque, comment ne pas trembler de tous ses membres ? Les fantômes du passé hantent le film ; des réminiscences spectrales obsédant notre mémoire s'instillent dans chaque plan. « Ce n'est qu'une copie de l'épisode quatre Â», mais qui peut se vanter de l'avoir réellement vu ? Il ne reste que des ruines de ce film et des événements mythiques qu'il raconte : de gigantesques vaisseaux écrasés et à moitié enfouit dans le sable aux mouvements perpétuels matérialisant le temps qui finira par l'engloutir totalement, comme cet AT-AT ou ce Destroyer gisant dans le désert telle la statue de la liberté de La Planète des Singes (1). Les personnages sont eux-mêmes spectateurs, sans en avoir conscience de la disparition d'une époque. Malgré le fait de parcourir ces vestiges, d'y apporter du mouvement, ces derniers témoins d'une époque mythique semblent être condamnés. Les personnages sont eux-mêmes écrasés par l'ampleur de cette mémoire qui les écrase ; seuls face aux gigantismes des ruines qui s’enfoncent de manière imperceptible. C'est le triste sort de la mémoire : disparaître dans le néant. Les événements historiques sont condamnés à s'effacer s'ils ne sont pas ravivés.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

            Par chance, l'apparition soudaine d'une preuve irréfutable des événements déviera la mémoire de cette sombre destinée : un contrebandier vieillissant et son acolyte poilu, dépositaires de cette mémoire évanescente presque perdue dans les limbes du temps. C'est alors que tout reprend vie ! Le désert, cette prison dont on avait du mal à s'échapper, s'éloigne pour laisser place à une planète luxuriante. Du peuple affamé au bord du gouffre nous passons à une cantina joyeuse, puis aux rebelles combatifs. Le film est un glissement constant vers la vie et le mouvement, à l'image de ce petit robot bleu se réanimant après une immense période de veille. Han Solo n'a-t-il jamais été aussi vivant sur ce pont avant de succomber ? Le coup de sabre ne l'a pas fait disparaître mais l'a rendu immortel : miroir sombre de la mort d'Obi-Wan (Réminiscence là encore). Le contrebandier passe définitivement de l'histoire à la légende.

 

            Star Wars VII n'est pas seulement le réveil de la force, mais le réveil d'une saga, d'une mémoire et d'un passé, rejetant la prélogie, ne la citant que pour s'en éloigner (La disparition de l'armée de clones et la destruction de Coruscante sont d'énormes « pieds de nez Â» à la dernière trilogie). Ce film est un coup de défibrillateur redonnant vie au fur et à mesure à tout un univers mortifié par presque quarante ans d'absence. Sa vivacité sera totale lors du retour tant espéré d'une figure légendaire, un Luke Skywalker plus que jamais dans les pas de son premier maître.

 

            Mais que serait devenu ce mythe sans ses adorateurs ayant perpétué la croyance ? Nous d'un côté de l'écran et les jeunes personnages de l'autre côté. Nous reprenons chacun le flambeau de la mémoire et devrons l'apporter à la génération suivante, et ces moments, ces événements que nous venons de vivre deviendront eux aussi histoire, légende et mythe. Telle la reconstitution de la carte, un nouvel univers naîtra de la rencontre entre les anciens et les jeunes : BB8/R2D2, Rey/Luke, Kylo Ren/Darth Vador.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

             Star Wars VII : Le Réveil de la Force, est une poignée de main vivifiante entre les anciens et les nouveaux ; une première pierre d'une nouvelle trilogie prometteuse. J.J. Abrams a réussi son pari, retourner à la trilogie originale tout en la dépoussiérant. Maintenant ressuscité de ces cendres, ce nouveau phénix va pouvoir réellement prendre son envol, vivre sa propre vie en se détachant petit à petit de son existence passée. Mais ne jamais oublier, ou c'est la mort !

 

                                                                                                         

 

      Vivien Soldé

 

 

(1) - De Franklin J. Schaffner (1968)

 

(2) - La planète s’appellerait finalement « Hosnian Prime ». Je laisse ici « Coruscante Â», car cette information n’est donnée que hors du film, et je ne prends que celui-ci en compte. Hosnian Prime et Coruscante étant toutes les deux des capitales et ayant des procédés architecturaux similaires, il me semble que beaucoup de monde en voyant le film peut avoir la même vision. Pour moi, qu’on l’interprète comme Coruscante ou comme Hosnian Prime, ce n’est qu’une histoire de certitude ou de métaphore. Dans tous les cas l’interprétation reste valable. 

 

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